Moulin Roos à Rosenau
La farine dans tous ses états
Moulin Roos à Rosenau
Publié le 24/05/2020 | par Jean-Michel Hell
Depuis 1910, la famille Roos exploite le moulin du même nom à Rosenau. Les boulangers sont les clients principaux de l’entreprise. Ils souhaitent s’approvisionner en farine produite par les agriculteurs du secteur. Depuis le début de la crise sanitaire, la vente directe auprès de particuliers s’est accélérée.
Autrefois, le moulin s’appelait « Le Moulin des Dames. » Mais, en 1852, il subit de grandes inondations et il ferme ses portes jusqu’en 1858. La dernière génération de meuniers est partie en 1900. Dix ans plus tard, le moulin est repris par la famille Roos. « C’est mon grand-père, Jean Roos qui le rénove. À l’époque, il y avait de nombreux moulins partout en Alsace, et principalement au bord des rivières. Mon père, également prénommé Jean, l’a ensuite exploité. Dans les années 1960, il y avait encore plus de 100 moulins dans la région. En 2019, il en restait treize dans le Bas-Rhin et sept dans le Haut-Rhin. Nous sommes l’un de ces sept », explique Jean-Pierre Roos qui avait repris la direction de l’entreprise en 1977.
Actuellement, l’entreprise est une société par actions simplifiées (SAS). Jean-Christophe a rejoint le moulin et l’autre fils de Jean-Pierre, Thomas, s’occupe de la boulangerie juste en face, Le Fournil du Moulin. Onze salariés exercent au moulin Roos. « Ce sont surtout des chauffeurs car la production, elle, est automatisée. Le reste du personnel travaille dans l’administration et dans la vente avec les commerciaux. Nous achetons le blé chez les agriculteurs proches et les négociants de la région. C’est du blé 100 % d’Alsace et de Franche-Comté. Il est essentiellement destiné aux boulangeries de cinq départements : le Haut-Rhin, le Bas-Rhin, le Territoire de Belfort, le Doubs et la Haute-Saône. Nous livrons une petite partie de la production à des industriels et à des GMS. Et nous complétons par de la vente au détail ici, au moulin », ajoute Jean-Pierre Roos. L’activité est régulière tout au long de l’année avec deux périodes un peu plus « creuses » : en février et, du 15 juillet au 15 août, quand les clients et les entreprises sont en vacances.
« Il faut être réactif »
Le blé qui arrive au moulin est d’abord trié selon les différentes variétés qui sont recommandées par la meunerie et selon les différentes qualités. Ce tri est réalisé dans les silos. « Il y a ici une vingtaine de cellules différentes. La traçabilité du blé est assurée tout au long de la chaîne pour avoir une qualité régulière. De bons blés permettent d’avoir une bonne farine à la sortie », précise Jean-Pierre Roos.
Les boulangers sont ensuite livrés par les camions et les chauffeurs de l’entreprise en sac de farine de 25 kg sur des palettes d’une tonne. Les agriculteurs qui travaillent avec le moulin Roos sont, pour la plupart, des habitués et proches géographiquement. « Nous avons réussi à les fidéliser. Ce qui n’a pas forcément été simple avec la multiplication des centres de collectes partout dans la région et proches des parcelles. Nous, ici, à Rosenau, on est un peu mal placé. Il faut donc être réactif. Surtout avec une moisson de blé qui s’est réduite à environ deux semaines, avec le matériel de récolte d’aujourd’hui, contre plus d’un mois, par le passé. Ici, nous ne vendons pas de semences ni autres produits phytosanitaires. On est seulement acheteur de blé chez les agriculteurs. Mais on peut leur garantir un prix car il n’y a pas d’intermédiaire entre nous. On peut aussi leur proposer une prime alors que le marché du blé est devenu plus volatil », ajoute Jean-Pierre Roos.
Des sacs de 5 kg
À ses clients, le moulin propose différents types de farines. Les « classiques » de boulangerie, les « pâtissières », les « spéciales » comme le pain paysan avec de la farine Méteil et régulièrement des nouveautés en farine de blé tendre. Il y a également des farines prêtes à l’emploi avec ou sans sel et d’autres comme celles de meule, celles bio ou encore celles avec des améliorants, comme la farine de blé malté. Depuis le début de la crise sanitaire, le moulin Roos voit arriver de nouvelles demandes et donc de nouveaux débouchés. « En temps normal, de nombreuses GMS s’approvisionnent souvent auprès de moulins plus éloignés et même situés à l’étranger, notamment en Allemagne, aux Pays-Bas et en Italie. Les farines en sachets viennent souvent d’Allemagne. Là, il y a eu des problèmes de logistique avec les transporteurs. Nous avons donc été sollicités par certaines chaînes pour livrer de la farine. On leur a alors proposé des sacs de farine de 5 kg. On sait le faire même si notre principal conditionnement, c’est le sac de 25 kg. Du coup, depuis deux mois, on a produit et vendu dix fois plus de sacs de 5 kg. Cela a permis de rattraper une petite perte des ventes liée à la fermeture de certaines boulangeries », poursuit Jean-Pierre Roos.
Pendant toute cette période, comme le reste de l’année, le travail est quotidien au moulin Roos. Le parc matériel a été rénové et agrandi dès la fin des années 1980. De nouveaux investissements sont régulièrement effectués. Faute de constructeur français, ces machines viennent essentiellement de Suisse et d’Italie : un équipement de qualité, qui permet de tracer le blé depuis son arrivée à l’entreprise jusqu’à sa transformation en farine puis, à sa mise en paquetage. Un suivi informatique est assuré chaque jour. Avec une capacité de production de 60 tonnes de blé par jour, le moulin Roos se situe dans une bonne moyenne. Les très petits moulins font une tonne par jour, les plus grands près de 1 000 tonnes.
Depuis toujours, à Rosenau, la vente au détail est possible au magasin de l’entreprise. « On a toujours eu des particuliers, essentiellement des voisins et des fidèles, qui viennent acheter ici. Mais cela n’a jamais représenté un gros chiffre d’affaires. Nous y tenons cependant car ce magasin nous permet de garder le contact avec la population. Depuis deux mois, on a vu arriver de nouveaux clients. Beaucoup nous appellent avant pour savoir s’ils peuvent acheter de la farine chez nous. Certains nous expliquent une fois sur place qu’ils cuisinent désormais et qu’ils ont besoin de farine », conclut Jean-Pierre Roos. La vente au détail est assurée le matin : de la farine essentiellement, mais également des aliments pour animaux. L’avantage de ce lieu ? Le magasin se trouve juste à côté de la salle des machines. En cherchant leur sac de farine, les clients peuvent apercevoir le moulin tourner.
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