Vie professionnelle

Édito

Une nouvelle ambition pour l’agriculture

Publié le 01/01/2021

phrasea_142607.png

Denis Ramspacher, président, et Denis Nass, vice-président de la Chambre d’agriculture Alsace.
Jean-Michel Hell

Par Denis Ramspacher, président, et Denis Nass, vice-président de la Chambre d’agriculture Alsace.

L’année 2020 restera sans doute gravée dans toutes les mémoires.

La crise sanitaire a bouleversé des pans entiers de notre économie. Et l’agriculture n’est pas épargnée. L’horticulture, la viticulture, les circuits courts ont été particulièrement impactés par le confinement, la fermeture des marchés, des magasins et restaurants. C’est l’ensemble des filières agricoles qui a dû s’adapter, réinventer ses circuits de commercialisation, d’approvisionnements et de transformation avec un bouleversement des habitudes de consommation. Tout cela a dû être fait en un temps record, avec des contraintes sanitaires fortes pour se protéger et protéger la santé des salariés.

La Chambre d’agriculture aussi a dû réorganiser son fonctionnement pour continuer à assurer toutes ses missions et ses services aux agriculteurs. Masques, gel, distanciation lors des contacts, télétravail, utilisation d’outils à distance, communication et conseil par mail, vidéo, téléphone, tout a été mis en œuvre par nos équipes pour rester à l’écoute et répondre aux besoins techniques, économiques, réglementaires et sanitaires…

Retrouver la souveraineté alimentaire

D’ores et déjà, nous pouvons tirer les premiers enseignements de cette crise. L’agriculture et l’alimentation, à côté de la santé, font partie des besoins essentiels de nos populations. On avait parfois tendance à l’oublier à l’heure de la mondialisation. Quand les frontières se ferment, quand la logistique se grippe, on se rend compte que le producteur d’à côté, que l’usine qui fabrique ici constituent une véritable garantie d’approvisionnement au quotidien pour nos concitoyens.

La souveraineté alimentaire, locale, nationale voire européenne n’est pas une vision du passé, mais un gage de sécurité et d’indépendance pour l’avenir de notre société ! Et il faut le répéter sans cesse aux consommateurs : ils sont les acteurs de cette souveraineté alimentaire au quotidien dans leurs actes d’achat.

Nos producteurs de vin, de lait, de viande, de sucre, de fruits et légumes, comptent plus que jamais sur ces consommateurs dans leurs fermes, dans leurs magasins, mais aussi dans les rayons de nos supermarchés et de plus en plus sur internet. Les décideurs politiques et élus de nos collectivités aussi peuvent agir sur la commande publique en restauration collective, en jouant la carte de la proximité lors des appels d’offres, en travaillant avec les producteurs et les filières, à la contractualisation au niveau des prix et des volumes.

Répondre aux enjeux climatiques

Outre la Covid-19, l’année 2020 a été marquée une nouvelle fois par la sécheresse qui a touché de nombreux secteurs en Alsace, parfois pour la troisième année consécutive. Le manque de pluie et la canicule cet été ont provoqué des baisses de rendements importants dans les secteurs non irrigués. Les prairies aussi ont souffert. Difficile dans ces conditions de reconstituer le stock fourrager pour les éleveurs ! 2020 sera donc une année compliquée pour le revenu de nombreux agriculteurs, surtout pour la viticulture mais aussi pour la viande, les betteraves et les grandes cultures dans les secteurs concernés. Enfin, n’oublions pas la forêt qui est fragilisée dans tout le Grand Est, à cause du manque d’eau, conjugué à la progression du scolyte.

Force est de constater que la question du changement climatique se pose avec toujours plus d’acuité. Nous devons trouver des solutions conjoncturelles pour y faire face avec des aides ponctuelles qui sont nécessaires pour passer le cap. Nous avons besoin aussi de systèmes assurantiels performants et nous devons surtout trouver des réponses structurelles pour augmenter la résilience des systèmes de productions.

On l’a vu encore en 2020, l’irrigation constitue indéniablement une réponse efficace au manque de pluie pour sécuriser de nombreuses productions et garantir une alimentation régulière et de qualité à nos consommateurs. Nous devons porter collectivement ce message pour garantir un juste accès à l’eau dans les secteurs historiques de la nappe et, ailleurs, pouvoir stocker l’eau quand elle est disponible, développer des réseaux collectifs là où c’est nécessaire.

Rappelons aussi que l’agriculture contribue de façon déterminante à la production d’énergie renouvelable avec le photovoltaïque sur toiture ou encore la méthanisation que nous pouvons encore développer. Et surtout, l’agriculture peut proposer de vraies solutions pour stocker durablement le CO2 dans les sols et les plantes. Nous devons résolument nous engager dans cette voie car les perspectives pour l’agriculture sont réelles dans ce futur marché du carbone !

Sécuriser le revenu

Si le revenu des agriculteurs dépendra toujours du prix et des volumes vendus, la future Pac doit garder sa vocation première : protéger les agriculteurs, sécuriser leur revenu, garantir des règles communes pour éviter les distorsions de concurrence au sein du marché unique et assurer aux consommateurs européens une alimentation sûre et de qualité. Sur le budget de la Pac, les décisions prises lors du sommet des chefs d’État du mois de juillet nous ont plutôt rassurés…

Au cours des discussions au niveau européen et dans le débat national qui va s’ouvrir, nous devrons collectivement faire valoir nos arguments sur la convergence des aides, la rotation, la diversité des assolements, le recouplage, le verdissement afin de trouver des solutions réalistes et pragmatiques qui tiennent compte des spécificités de notre territoire et de nos filières. Sans oublier la poursuite des politiques essentielles en faveur de la montagne, l’installation et les programmes d’investissements du 2e pilier.

Face à la crise sanitaire et climatique, le président de la République a annoncé un vaste plan de relance qui comporte un volet agricole doté de 1,2 milliard d’euros. L’ambition affichée est grande pour que l’agriculture puisse rebondir après la crise de la Covid19 et répondre aux enjeux alimentaires de proximité, aux enjeux climatiques et sociétaux actuels. Les premiers appels à projet sont parus et les mesures en faveur des agroéquipements seront ouvertes à partir du mois de janvier sur le principe « premier arrivé, premier servi ». Les collectivités territoriales aussi travaillent à des dispositifs d’accompagnement de cette relance. Il est important que ces plans soient bien coordonnés et complémentaires et qu’ils puissent efficacement accompagner les transitions en cours, les projets des agriculteurs et des filières. Nous serons aux côtés des institutions, avec l’ensemble des organisations professionnelles, pour les informer sur ces dispositifs, les guider et les conseiller dans leurs démarches.

Retrouver la confiance

Mais au-delà des mesures de relance qui sont nécessaires, il est essentiel avant tout de retrouver confiance en l’avenir. Les crises successives, la conjoncture difficile, mais aussi l’empilement des contraintes réglementaires et les phénomènes d’agribashing ont ébranlé le moral de nombreux agriculteurs qui s’interrogent sur l’avenir, qui hésitent à investir, à s’installer… Ces interrogations sont légitimes et il faut y apporter des éléments de réponses à défaut de certitudes.

L’agriculture alsacienne dispose de solides atouts avec des filières diversifiées et un vaste bassin de consommateurs. Nous devons préserver toutes ces filières et en particulier celles qui connaissent une conjoncture difficile comme la vigne, la betterave ou la viande. Le maintien de nos outils de transformation, de valorisation ou d’abattage est indispensable pour pérenniser toutes les productions. Nous devons tisser davantage de liens avec les nombreuses entreprises agro-alimentaires de la région pour mieux valoriser nos productions et en développer de nouvelles. De vraies opportunités de développement existent dans les filières longues ou courtes, dans le bio ou le conventionnel, dans la production d’énergie et demain, dans le marché du carbone.

L’ensemble des élus et des collaborateurs de la Chambre d’agriculture est pleinement engagé aux côtés des agriculteurs alsaciens pour répondre à ces enjeux multiples. Pour y parvenir, nous aurons besoin de la confiance des consommateurs et du soutien de nos concitoyens. Nous nous sommes d’ores et déjà engagés à mieux communiquer sur nos produits, sur nos pratiques et les réalités de l’agriculture d’aujourd’hui.

Nous aurons besoin aussi de l’écoute et de l’appui des services de l’État sur de nombreux sujets et d’un partenariat renouvelé avec les collectivités territoriales, la Région Grand Est, la nouvelle Collectivité Européenne d’Alsace.

Nous vous souhaitons de passer de paisibles fêtes de fin d’année en famille. Que 2021 puisse vous apporter la santé, la sérénité et beaucoup de satisfaction dans vos projets personnels et professionnels.

 

??? [CONSOMMER LOCAL] Plus encore à cette période, le consommer local et de qualité s'applique à l'approche des fêtes de...

Publiée par Chambre d'agriculture Alsace sur Lundi 14 décembre 2020

 

 

Les vidéos