Cultures

René Barth à Lochwiller 

Une roseraie à transmettre

Publié le 06/12/2024 | par Anne Frintz

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René Barth et deux fidèles clients posent dans le hangar technique, à Lochwiller.
Anne Frintz
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La Django Reinhardt est une création signée roseraie Barth, à l’occasion de son vingtième anniversaire.
René Barth
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La chambre froide de la roseraie, à l’automne, est pleine de la récente récolte.
Anne Frintz
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Plus de 300 étiquettes pour plus de 300 variétés de roses.
Anne Frintz
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Sur la plateforme des rosiers en pots, René Barth savoure la fin de la journée.
Anne Frintz
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Un salarié rempote des pieds de rosiers, dans le hangar, en novembre 2024.
Anne Frintz

Seul producteur de rosiers dans le Grand Est, l’exploitant agricole René Barth cède son fonds de commerce, l’immeuble et ses terres. Culture spéciale, la rose à planter, que René Barth vend en direct ou à des professionnels (jardineries, paysagistes, etc.) représente les trois quarts du chiffre d’affaires de l’entreprise individuelle. La roseraie Barth, de son nom commercial, à Lochwiller, est efficiente en l’état, assure le pépiniériste qui a presque quarante ans de métier. Il transmet aussi son savoir-faire.

Gestion triennale, culture biennale, fibre commerciale : la production et la vente de rosiers de jardin sont très spécifiques mais simples, si on a le goût des roses et de ses amateurs, dit René Barth. Unique pépiniériste spécialisé dans les plants de rosiers, au nord d’une diagonale allant de Lyon à Rennes, le chef d’exploitation transmet aujourd’hui sa roseraie, qui selon lui a encore de beaux jours devant elle, puisqu’il n’existe plus que quelques producteurs en France. « Ce sont les rosiers qui me font vivre : ils représentent les trois quarts du chiffre d’affaires de l’exploitation. 1 ha de plants génère 300 000 euros », résume René Barth.

Céder le fonds de commerce est ce qui lui importe le plus. Pour la terre et l’immobilier (un atelier de 700 m2 et une chambre froide de plus de 1 000 m3), il trouvera facilement un acquéreur, quelle que soit sa production, sait-il. René Barth, qui pourrait déjà être à la retraite, est même prêt à revendre sa maison à Lochwiller, quasiment attenante au hangar technique et à une plateforme de rosiers en pot.

Le développement des rosiers en pot

« Le verdissement est en plein essor. Je transmets un outil efficient mais il y a tout de même, à mon sens, encore une possibilité d’évolution, avec des moyens raisonnables, dans le domaine des rosiers en pot. Le prêt à l’emploi, prêt à planter, se développe. C’est un achat coup de cœur, pour offrir. Le rosier en pot est un cadeau qui dure dans le temps, puisque le récipiendaire le plante dans son jardin. Sur ce marché, je pense qu’il y a encore des marges à faire, d’autant plus que sa production s’étale sur douze mois, dans l’année », partage-t-il.

René Barth exploite 82 ha de SAU. Ils sont trois équivalents temps plein sur la ferme, avec son épouse et des saisonniers. En 2024, humidité oblige, il a renoncé au blé. Généralement, il en cultive environ 30 ha, idem en maïs, plus 10 ha de tournesol ou de colza. 8 ha sont dédiés au verdissement, par rapport à la Pac. Tout est en conventionnel. Les rosiers s’épanouissent sur 3 ha : près de 70 000 porte-greffes sur trois bandes. Si le fonds de roulement est calculé sur trois ans, les pieds de rosiers mettent deux ans à être commercialisables.

300 variétés de roses

Au début du premier été, les rosiers sont greffés en plein champ, sur des porte-greffes plantés au printemps : c’est l’écussonnage. Rosa canina inermis et laxa (de l’églantine, soit un descendant de rosier sauvage) a été choisi comme porte-greffes adaptés à tous types de sol pour obtenir des rosiers plus fleuris et plus robustes, ici, loin du climat méditerranéen qu’affectionne la plante, et dans un sol argilo-calcaire. Il y a beaucoup de pertes, à cette étape : de l’ordre d’un tiers. Après le repos hivernal, des tailles successives permettent d’obtenir le rosier idéal, à trois ou quatre branches. En octobre, enfin, arrive la récolte, l’étiquetage et la vente, qui durent tout l’hiver. Entre la préparation des terres, en janvier de la première année, et la récolte, à l’automne suivant, presque deux années se sont écoulées.

Les variétés greffées sont protégées ou tombées dans le domaine public. Pour les premières, il faut s’acquitter de droits et garantir l’authenticité, par l’étiquetage de chaque plant, même si les greffons sont reproductibles. La roseraie Barth propose plus de 300 variétés aujourd’hui. « Les plus recherchées sont les grandes fleurs à bouquet, celles qui sentent la rose, les coloris originaux, les variétés saines, génétiquement robustes, et les rosiers en pot que j’appelle produit fini », énumère le producteur. Il détient quatre créations : la Folie’Flore, une rose crème élaborée pour le show floral mulhousien du même nom ; le Grand huit grimpant ; le Manou Meilland grimpant et le Django Reinhardt, une rose rouge cerise, lancée en 2014, à l’occasion du vingtième anniversaire de la roseraie Barth.

Une culture spéciale presque comme les autres

La vente directe aux particuliers représente 40 % du chiffre d’affaires. Celle aux professionnels 60 %. 80 % des commandes sont virtuelles : le dernier catalogue papier date de 2014-2015. Les pieds sont pour la plupart expédiés. Si le fichier clients compte 30 000 noms, René Barth admet qu’il y a « un grand ménage » à faire.

« Il faut avoir une bonne mémoire et la connaissance du milieu pour exceller. Les références, la clientèle, les conseils : il faut tout retenir ou du moins savoir, où on a inscrit quoi. Aujourd’hui, je suis membre de l’association Planète Légumes fleurs et plantes. Il faut se tenir à la page. Mais c’est un métier qui s’apprend. Moi, j’ai appris sur le tas. Si on aime la terre, si on connaît le cycle de production d’un végétal, c’est facile », conclut René Barth.

 

 

 

 

 

Un parcours bien rempli

Installé en polyculture-élevage en 1985, René Barth estime rapidement que les quotas laitiers ne lui permettront pas de vivre décemment. En 1987, se présente à lui une opportunité qu’il saisit au vol : le rosiériste obtenteur (créateur de roses nouvelles) Léon Beck, qui cultive sur 200 ha à Hautepierre, cherche encore des surfaces pour produire. René Barth devient alors prestataire de service sur 10 ha. Deux ans plus tard, il compte 270 000 porte-greffes de rosiers, dans son emblavement, sur 20 ha. En 1988, l’atelier laitier disparaît. Six ans plus tard, René Barth gère sa propre production et construit la chambre froide pour conserver les rosiers destinés à la vente. Le premier catalogue date aussi de 1994. La société se développe d’année en année.

Commercial et producteur

En 2005, René Barth est approché par Nirp International, leader mondial de la rose, anciennement Léon Beck. Il a toute la génétique de ces rosiers de jardin chez lui. Il les connaît. Nirp International l’emploie donc pour démarcher les pays de l’est et du nord européen : la Hollande, l’Allemagne, la Pologne, la Bulgarie. En parallèle, René Barth continue sa production. Ils sont au moins cinq équivalents temps plein sur l’exploitation en 2015, quand René Barth compte 300 000 plants de rosiers, sur 12 ha. Mais la crise financière mondiale et le gel de 2011 et 2012 ont raison de certains emplois. La voilure est réduite, en termes de main-d’œuvre autant qu’en surfaces dédiées, et l’activité redevient florissante, jusqu’à aujourd’hui.

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