Vie professionnelle

Distillerie Massenez

La baguette et le roquefort mis en bouteille

Publié le 10/03/2023 | par DL

Liqueur de roquefort
Une liqueur de roquefort et une liqueur de baguette, deux propositions détonantes de la distillerie Massenez.
D. Lefebvre
Griottine Bernard Baud
Bernard Baud, PDG des distilleries Peureux.
DL
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Miss Massenez cocktails, Golden Eight, de nouvelles stratégies développées avec succès par le nouveau staff de la distillerie Massenez à Villé. (Manou Massenez, Bernard Baud et Elodie Naslin).
Sylvie Mattlé

« Séparer l’esprit du roquefort et de la baguette de leur matière », tel est le nouveau challenge de la distillerie Massenez à Dieffenbach-au-Val qui propose deux liqueurs inédites pour de nouvelles expériences gastronomiques.


Une liqueur de roquefort, une liqueur de baguette, la distillerie Massenez bouleverse les traditions de la distillerie et pousse à son paroxysme le principe de la distillation qui consiste à « séparer l’esprit d’un fruit de sa matière pour lui donner la vie éternelle ». Cette fois-ci, il ne s’agit donc plus de fruits, mais de produits traditionnels emblématiques de la gastronomie française. Il fallait oser !

Le roquefort et la baguette sont mis à macérer dans de l’alcool, puis les deux macérats sont mis à distiller toujours séparément…

Bernard Baud n’en dira pas plus sur le mode opératoire : « Simplement on trempe du roquefort (ou une baguette) dans de l’alcool, mais la question c’est à quel degré d’alcool et à quelle température ? Quelle courbe de chauffe ? Combien de temps ? Quelles quantités respectives ? »

Entre sensations gustatives et représentations mentales

Cette idée incongrue de distiller un pain, Bernard Baud, le créatif PDG de la distillerie Massenez qu’il a reprise en 2010, l’a observée en 2020 sur « la scène mixologique » de Melbourne.

Lesquels mixologues australiens sont en quête de sensation texturante pour leurs cocktails. Quant à la liqueur de roquefort, elle est l’aboutissement d’un travail d’exploration de nouveaux accords avec le duo de fromagers strasbourgeois Cyrille et Christelle Lorho.

En 2020, leur rencontre avec le distillateur a été déterminante pour les conforter dans cette idée que les fromages pourraient s’associer parfaitement au plan gustatif avec des liqueurs.

On connaissait déjà en Alsace le fameux kirsch au siesskass, ce munster à peine fait, un « must » des fermes auberges vosgiennes.

Le tandem maîtres fromagers – distillateur va alors explorer d’autres associations et créer « les accords frappés ».

 

Une proposition d’accords de fromages et de liqueurs déclinée en coffrets ou proposée auprès des restaurants. Ce qui, au passage, relance l’intérêt pour le plateau de fromages.

En effet, cette proposition répond aux attentes expérientielles du public, car « on ne va plus au restaurant aujourd’hui pour manger, mais pour vivre une expérience », confirme Bernard Baud.

Tremper son fromage dans l’eau-de-vie

En tout cas,

« la réaction du public à ces accords frappés a été incroyable. Ils connaissent un vrai succès en gastronomie. Je prends un fromage et je le trempe dans un verre d’eau-de-vie », confirme Cyrille Lorho.

 

Parmi les accords qui se détachent, le roquefort trempé dans la liqueur Golden eight de Massenez est « unanimement apprécié même pour qui n’aime pas le roquefort ». Ce succès a donc poussé le distillateur à recueillir l’esprit de ce fromage emblématique dans une liqueur.

Un partenariat a été noué avec la cave Barragnaudes de la maison Société, laquelle espère en retour par la voie de la mixologie, faire connaître son fromage sur de nouveaux marchés mondiaux et parmi de nouvelles générations de jeunes consommateurs.

Ces deux liqueurs ouvrent de nouvelles perspectives gustatives pour les artisans chocolatiers, les pâtissiers, les chefs restaurateurs, les barmans et les mixologues qui vont faire vivre de nouvelles expériences.

D’ailleurs, le trio Baud-Lorho a pu présenter ses accords détonants le 5 mars lors d’un dîner de gala pour la cérémonie du guide Michelin qui s’est déroulée en Alsace, en présence de 500 convives et une pléiade de chefs étoilés français et européens.

Une révolution gustative initiée en 2010

Cette révolution gustative à la distillerie Massenez s’inscrit dans un mouvement opéré en 2010, quand la Distillerie Peureux a repris la maison alsacienne qui fut fondée en 1870. Très vite la maison de Fougerolles, connue pour sa Grillotine, a su dégager des synergies et complémentarités commerciales. Mais c’est au plan de l’innovation que l’association va être particulièrement fructueuse.

En 2012, elle rénove le packaging en retrouvant la bouteille originelle de Gabriel Massenez. Avec la gamme Miss Massenez, elle se lance dans les concentrés de cocktails pour permettre la mixologie dans des bars non équipés, comme sur la flotte CroisiEurope.

Ces concentrés permettent par ailleurs de contourner une difficulté centrale pour les eaux-de-vie d’accéder au marché de la mixologie : « Notre image est empreinte d’alcool fort.

Je dis souvent qu’à Noël, on repart à la case prison avec les Bronzés font du ski, où le gars s’étouffe avec un alcool blanc, illustre Bernard Baud. Alors, quand on parle d’eau-de-vie dans la mixologie, la réaction c’est que ça va être trop fort. Pourtant, ça ne dérange pas d’ajouter aux cocktails de la vodka, du rhum ou du whisky… »

 

 

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